22 août 2012

QUE RESTE-T-IL DE LA CRÉDIBILITÉ DES LIBÉRAUX ?

 
Nous voulons réagir aux propos tenus par Robert Dutil au sujet de l’autoroute 73 et notamment,

· à Radio-Canada où il mentionne que « Le Parti québécois, qui a lutté contre l'autoroute de la Beauce, a perdu toute crédibilité en Beauce [...] », http://www.radio-canada.ca/sujet/elections-quebec-2012/2012/08/15/015-duel-electoral-plq-caq-beauce-sud.shtml

· Sur différentes tribunes où il mentionne que le prolongement de l’autoroute 73 n’ait été réalisé que sous la gouverne du Parti libéral.

Au contraire des propos de Monsieur Dutil, il est tout à l’honneur du Parti Québécois de s’être opposé, non pas au prolongement de l’autoroute 73, mais à l’adoption d’une loi spéciale qui sanctionne la violation de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, de la Loi sur la justice administrative, de la Loi sur la qualité de l’environnement et de la Loi sur l’expropriation;

Faille-t-il rappeler à Monsieur Dutil que son gouvernement et ses ministères ont une responsabilité dans la protection et le respect de l’environnement, du territoire et des activités agricoles, et conséquemment, le dossier de l’autoroute 73 fournit malheureusement l’exemple d’une situation où c’est son gouvernement, prônant la Loi et l’ordre, qui a contrevenu à ses propres lois et règlements en la matière;

Faille-t-il lui rappeler que le Parti libéral, dans le dossier de l’autoroute 73, a refusé la valeur de la Loi, a refusé sa finitude, a refusé la soumission de son gouvernement au pouvoir de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure et a refusé de reconnaître le droit des citoyens de s’adresser à la justice;

Faille-t-il lui rappeler que le prolongement de l’autoroute 73 par le tracé de référence à Beauceville, communément appelé « tracé Ouest », a été autorisé et décrété depuis trois décennies, en respect des lois environnementales, sous la gouverne de René Lévesque du Parti québécois, alors que Monsieur Dutil était maire de St-Georges;

Que le nouveau tracé proposé sous son gouvernement en 2004, le tracé Est, n’a reçu ni assentiment du B.A.P.E. ni autorisation finale et sans appel du Tribunal administratif du Québec ni même une décision légale de son Conseil des ministres de l’imposer suivant un jugement de la Cour supérieure;

Faille-t-il lui souligner que la Loi 2, adoptée par le Parti libéral, est une solution d’esquive des tribunaux, prise sous la dictée d’un groupe de pression qui a descendu dans la rue, irrité des décisions juridictionnelles défavorables et des délais inhérents de justice et c’est sans aucun fondement rationnel que le Parti libéral a violé les lois d’ordre public et général pour appliquer de façon tout à fait arbitraire ses propres vues sur le projet en cause.Huis H;

Faille-t-il lui rappeler que la soumission des gouvernants aux règles juridiques est le fondement de l’État de droit;

Faille-t-il lui rappeler qu’il est incompatible avec la prééminence du droit dans une société démocratique et avec les principes fondamentaux du droit que des citoyens ne puissent s’adresser aux tribunaux et n’obtiennent l’effectivité des décisions de justice rendues à l’encontre de l’État;

Qu’au vu de ce qui précède, n’eut été du changement de tracé par son gouvernement du Parti libéral, le prolongement de l’autoroute 73 serait non seulement déjà réalisé mais qu’en plus, il répondrait aux exigences des lois environnementales;

Faille-t-il mentionner à Monsieur Dutil également que le Parti libéral, par l’entremise du ministre Sam Hamad, s’est engagé à nous rembourser nos frais judiciaires des suites de l’adoption de la Loi 2, engagement réitéré par le ministre Pierre Moreau, et qu’à ce jour, par une offre ridicule couvrant à peine le tiers de nos frais, son gouvernement n’a pas respecté ses engagements;

Qu’enfin, dévoilons aussi que depuis l’adoption de la Loi 2, aucun certificat d’autorisation n’a été émis par le ministre du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs et qu’aucun décret d’expropriation n’a été pris par son Conseil des ministres;

Qu’effectivement, il est plausible de croire qu’aucun travaux ne sera réalisé sous la gouverne d’un autre parti que le Parti libéral puisqu’il s’opposera à la réalisation du prolongement de l’autoroute 73 si le nouveau parti au pouvoir, plus responsable et respectueux des lois et de nos instances démocratiques, oserait reconsidérer le tracé Ouest, traversant les terres des petits amis du Parti libéral;

Qu’aux vues de l’ensemble des éléments énoncés, Monsieur Dutil est malvenu de miner la crédibilité du Parti québécois et qu’il plaise aux citoyens de la Beauce de donner à Robert Dutil, le 4 septembre prochain, le peu de crédibilité qui lui reste encore.




Commentaire

Article des Partisans magnifiquement écrit.
 
Je dirais même plus que le libéral Dutil s'est particulièrement acharné à camoufler, contourner, minimiser, saborder, esquiver pendant 8 ans, qu'il a refusé toutes formes de discussions, de négociations, de compromis, d'entente au contraire, il a menti, tergiversé, bafoué, volé, scrappé l'environnement, le droit, la vie et la Beauce en entier....bref Dutil  est le plus parfait exemplaire du libéral type ( ...c'est pour toutes les erreurs manifestes dans ce dossier que je ne peux pas vous appeler monsieur mais juste... libéral )

Déshonneur à Dutil

30 juil. 2012

Politique - Qu’est-ce donc que la démocratie?

Alexandre Ménard - Diplômé de la faculté de droit de l’Université de Montréal 30 juillet 2012 Québec

La manifestation du 22 juillet contre la hausse des droits de scolarité, à Montréal, qui défiait la loi 78 du gouvernement.
Photo : François Pesant Le Devoir
 
La manifestation du 22 juillet contre la hausse des droits de scolarité, à Montréal, qui défiait la loi 78 du gouvernement.

Qu’est-ce que la démocratie ? Mes études en droit international et comparé à Vienne et à Pékin ne m’ont certainement pas permis de répondre à cette question. Au contraire, mes recherches ont plutôt contribué à détruire l’image que j’avais de ce concept que je croyais jusque-là bien façonné. Mais ce concept, perçu comme un système social utopique, de quoi est-il le gage ?

Dans le conflit qui a sévi au Québec, les gouvernants ont rapidement fait ce que leurs homologues du monde entier auraient fait : ils ont défendu leurs actions en invoquant LA démocratie. Raymond Bachand, parmi d’autres, affirmait que la pression de la rue n’avait pas sa place en société, puisque dans un système démocratique, l’expression populaire n’est légitime qu’au moment du suffrage universel ; grosso modo, de l’avis du gouvernement, « nos actions sont légitimes puisque nous avons été élus démocratiquement », un raisonnement que je critiquerai sévèrement dans les prochaines lignes. En effet, je vous propose d’analyser la fameuse position selon laquelle, en démocratie, « si tu n’es pas content, tu n’as qu’à voter aux prochaines élections ».

Pratiquement tous les dirigeants du monde entier - du moins là où la monarchie n’est plus - se targuent de vivre dans un système démocratique. Alors ici, nous prétendons vivre dans un système démocratique et plus largement de savoir ce qu’est LA démocratie. Nous prétendons même pouvoir critiquer de façon hégémonique les autres systèmes ; ceux-là qui n’ont pas encore compris ce que c’est la « vraie démocratie » (et ce ne sont pas les exemples d’impérialisme doctrinal qui manquent !). C’est tout, nous savons, donc les autres ont tort ! Pourtant, allez à Moscou, et les officiels tiendront le même discours… Où est-ce que je veux en venir ? Cette réflexion préliminaire sur la portée de la démocratie porte sur deux prémisses, l’une touchant son contenu, l’autre son contenant.

Indéfini mais universel

Primo, les intellectuels oeuvrant en droit international s’entendent sur un point : le concept de démocratie est indéfini. La démocratie n’est pas une norme morale absolue en soi, puisqu’elle est indéterminable. C’est en réalité une idéologie qui diffère en fonction de l’auteur qui en traite. Il ne peut donc s’agir d’un concept universel à l’échelle internationale.

Secundo, on remarque que l’utilisation du concept de la démocratie, elle, est universelle. En effet, chaque représentant étatique se proclame à la tête d’un système démocratique.

Bref, la forme est universelle en dépit du fond.

Mais à quoi sert cette coquille ? Elle sert tantôt aux intellectuels qui tentent de définir une justice universelle ou naturelle, tantôt aux détenteurs du pouvoir. Pour ces derniers, c’est à des fins politiques que cette coquille prend toute son importance.

Mais quel est le rapport avec le conflit québécois ? J’y arrive…

Je disais plus haut : c’est tout, nous savons, donc les autres ont tort. Charest sait, donc il a raison. Que sait-il ? Ce qu’il sait, c’est comment on exploite l’idée de démocratie pour faire avaler à monsieur madame Tout-le-monde que ses actions sont justes. Voilà vraiment ce qu’il sait de la démocratie, le contenu demeurant d’une grande futilité à ses yeux. Comme tous ceux qui tentent de freiner l’émergence des idées au Québec, tous ceux qui prônent le statu quo ou les détracteurs des élections à date fixe.

À ceux qui prétendent que la seule façon légitime de se faire entendre est de voter aux élections, je réponds : « Attention ! Le retour du balancier pourrait être dévastateur. Il est possible que cette position ne vous serve qu’un temps seulement. » Je m’explique…

À une époque archaïque, la légitimité du pouvoir tenait au sang des monarques. Aujourd’hui, le pouvoir légitime se fonde dans la démocratie.

Historiquement, notre compréhension de ce pouvoir « légitime » s’est faite par étapes. Nous avons cru après la Première Guerre mondiale qu’un parlement élu était nécessairement légitime. C’est à ce moment que le Parti national-socialiste (parti nazi) de Hitler fut élu. Il a adopté des lois ayant conduit à la tristement célèbre « solution finale de la question juive », qui commandait rien de moins qu’un génocide. Ces lois ont été adoptées en assemblée par une majorité d’élus. Rien de plus démocratique ? J’en doute.

C’est ensuite qu’on a compris que la primauté du droit, l’un des principaux axes de la démocratie, devait s’associer à certaines normes morales pour demeurer légitime. La Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée en 1948 par l’ONU, suivra…

Charte et constitution

Théoriquement, dans un contexte de gouvernement majoritaire, comme en ce moment au Québec, la Charte des droits et libertés est notre gardienne contre un régime totalitaire temporellement limité par la durée du mandat. C’est devant cette réalité théorique que le législateur l’a fusionnée avec la Constitution. Cette même charte consacre la liberté d’association et d’expression, nous attribuant le droit de manifester notre désaccord. Personne ne disconviendra que la Charte soit un élément central de notre système démocratique. Pourtant, certains condamnent l’exercice de ce droit en tenant des propos comme ceux endossés par notre gouvernement.

S’il est vrai que notre système démocratique assure la tenue d’élections législatives, il ne se limite pas à cela. Le respect de nos droits et libertés fondamentales est aussi assuré par cette même « démocratie ». M. Charest n’agit pas en son nom, il la viole. C’est aux intellectuels de déterminer le contenu de la démocratie, pas aux politiciens, qui la déforment de façon circonstancielle, de manière à imposer leurs volontés, comme l’équipe libérale a su le faire pendant le printemps québécois.

Mon raisonnement tente de démontrer que si M. Charest restreint l’expression de la rue en ne respectant pas les chartes canadienne et québécoise des droits et libertés, l’exercice de son pouvoir est illégitime, puisque non démocratique. Peu importe à quel point il se targuera d’être un grand démocrate, il ne l’est pas. De surcroît, la banalisation de ces manquements serait le plus grand aveu de faiblesse de notre nation, pourtant si forte.

***

Alexandre Ménard - Diplômé de la faculté de droit de l’Université de Montréal

19 juin 2012

ZÉRO $ DE LA PART DU GOUVERNEMENT LIBÉRAL COMME COMPENSATION « JUSTE ET ÉQUITABLE »

Le 1 juin 2011, à la veille de l'adoption de la Loi 2, le ministre des Transports, M. Sam Hamad, a pris l'engagement d'entreprendre des discussions avec les citoyens qui avaient obtenu gain de cause auprès du Tribunal administratif du Québec et de la Cour supérieure pour qu'ils soient justement et équitablement compensés, la Loi 2 les privant de leurs droits judiciaires et civils. En septembre 2011, le ministre actuel, M. Pierre Moreau, réitérait cet engagement.

Or, à ce jour, Mme Josée Bilodeau, M. Pascal Veilleux ainsi que de Mme Manon Poulin et M. Marc Saint-Hilaire n'ont reçu aucune compensation pour le remboursement des frais judiciaires d'environ 120 000 $ qu'ils ont encourus inutilement des suites de l'adoption de la Loi 2 par le gouvernement libéral.

Rappelons que le gouvernement libéral a eu recours à une mesure législative pour valider un décret du Conseil exécutif précédemment déclaré nul par l'honorable juge Paul Corriveau de la Cour supérieure alors même que le Procureur général interjetait appel de ce jugement devant la Cour d'appel.

Adopté à l'imminence de l'audience de la Cour d'appel, la Loi 2 a permis au gouvernement d'invalider lui-même le jugement qu'il portait en appel et d'annihiler l'action en justice des citoyens devant le Tribunal administratif du Québec contre la seconde décision de la CPTAQ, sursit depuis l'adoption du décret pris à la veille de l'audience, pour éviter la question du tracé de moindre impact pour le secteur de Beauceville.

La Loi 2 se révèle, une fois le voile levée des données litigieuses du MTQ à la base de la décision de la CPTAQ, comme une solution du MTQ pour esquiver les tribunaux, prise sous la dictée d’un groupe de pression, irrité des décisions juridictionnelles défavorables et des délais inhérents de justice et c’est sans aucun fondement rationnel que le législateur a violé les lois de protection de la qualité de l'environnement et de l'intégrité du territoire agricole pour appliquer de façon tout à fait arbitraire ses propres vues sur le projet en cause;

Dommage que le gouvernement libéral n'est pas souffert autant d'irritation pour la réalisation du tracé Ouest, la population beauceronne y circulerait depuis trois décennies !!!

17 févr. 2012

Quand Dutil cite Montesquieu

Montesquieu et Robert Dutil...<br />
Photo : Photomontage: Dave Noël

Montesquieu et Robert Dutil...

En chambre tout à l'heure, le ministre de la Sécurité publique Robert Dutil, répondant à Sylvie Roy de la Coalition avenir Québec, affirmait que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) «est totalement indépendant du pouvoir législatif et exécutif».

Comme avocate, la députée caquiste devrait le savoir, a-t-il insisté, ajoutant que «personne ne peut donner d'ordre au DPCP [...] Dans notre société démocratique, un des piliers, c'est la séparation du pouvoir judiciaire du pouvoir législatif et exécutif».

Et la pièce de résistance suit : «Elle a dû lire Montesquieu, là, dans son cours, à un moment donné, 'L'esprit des lois'. Elle doit savoir ça, que, depuis deux siècles, le politique ne se mêle pas des enquêtes policières. Il me semble que ce n'est pas un mystère, cette question-là, et qu'elle devrait peut-être retomber dans ses lectures antérieures.»

L'affirmation de M. Dutil a quelque chose d'angélique. Depuis 200 ans, «le politique de se mêle pas des enquêtes»? Vraiment? Et le sort du journaliste Pierre Bédard? Et la condamnation des patriotes? Et la faillite de Roncarelli?

De plus, les régimes politiques canadien et québécois n'ont rien de la pure séparation des pouvoirs dans les républiques telles les États-Unis. Nous vivons ici —et nous nous en accommodons— en confusion totale des pouvoirs où l'exécutif est tout puissant. Ce dernier contrôle le législatif presque totalement.

Heureusement que depuis quelques années —pas longtemps—, il y a augmentation du nombre de «personnes désignées» par l'Assemblée nationale, le «club des cinq»: le Directeur général des élections, le Vérificateur général, le Protecteur du citoyen, le Commissaire au lobbyisme et le Commissaire à l'éthique. Ces derniers, bien qu'ils ne soient pas élus par la population, tirent leur légitimité du législatif, ce qui redonne un peu de pouvoir à ce pouvoir — si vous me permettez la redondance.

D'ailleurs, je me demande bien pourquoi le DPCP, ainsi que le chef de l'UPAC (l'Unité permanente anticorruption), ne seraient pas nommés par l'Assemblée nationale? En mars 2011, lorsque j'ai posé la question au patron de l'UPAC Robert Lafrenière dont on venait d'annoncer la nomination, il a déclaré se sentir «tout à fait indépendant».

Mais qui est-il pour en juger? Bien qu'il n'y ait pas de doute quant à son intégrité, n'a-t-il pas depuis semblé faire systématiquement le jeu du gouvernement?

Au reste, ne l'oublions pas, l'exécutif nomme les juges —et on a vu à quel point ce rapport était problématique avec les affaires Bellemare et la Commission Bastarache.

Dans un article fondateur intitulé De la monarchie en Amérique, l'essayiste Marc Chevrier se penchait sur la «confusion des pouvoirs» qui caractérise les régimes québécois et canadien. En voici quelques extraits, en écho à la sortie de M. Dutil:

«Plusieurs pouvoirs et prérogatives, au lieu d'être séparés, sont exercés par les mêmes personnes ou institutions. Les fictions de la Couronne de la monarchie anglaise ont toujours posé un frein mental à une complète et nette séparation des pouvoirs.»

«Au nombre de ces pouvoirs qui se confondent ou se recoupent, on note que la fameuse responsabilité ministérielle, dont on se fait gloire au Canada qu'elle fut advenue sans révolution, a entraîné avec le temps le transfert progressif de l'initiative des lois du parlement vers le cabinet. Aujourd'hui, les lois naissent du parti ministériel, rédigées et conçues par l'Administration. La Chambre des Communes et l'Assemblée nationale se bornent le plus souvent à enregistrer, après quelques retouches consenties en commissions parlementaires, les lois présentées par l'exécutif. La séparation entre l'exécutif et le législatif est purement formelle; le premier se soumet aux décrets de l'autre, bien que ce soit l'exécutif qui les ait dictés.»

«Une autre confusion, et non la moindre, est la prérogative du Premier ministre de convoquer (ou de révoquer) à son gré les sessions de l'Assemblée, et de choisir, au moment électoral opportun, la date des élections générales.»

«La confusion des pouvoirs touche aussi le judiciaire. Depuis le début du siècle, le gouvernement central et les provinces se sont accoutumés à demander à leur cour d'appel des avis sur toutes sortes de questions de droit, même en l'absence de litige concret. Bien qu'il reconnût la légalité de la procédure, le Conseil privé de Londres admit que le renvoi n'était pas à proprement dit une fonction judiciaire. La république américaine est allergique à l'idée que les tribunaux deviennent les conseillers légaux de l'exécutif. Au nom de la séparation des pouvoirs, la Cour suprême américaine s'est objectée aux renvois, puisqu'il s'agit d'une tâche relevant de l'exécutif.»

«La plus étrange - pour ne pas dire la plus cocasse - des confusions entre l'exécutif et le judiciaire est cette possibilité, pour l'instant toute théorique, prévue par les lettres patentes de 1947 constituant la charge du gouverneur général: le juge en chef de la Cour suprême peut lui succéder. En effet, en cas d'incapacité ou d'absence du premier, le deuxième devient le chef suppléant de l'État canadien. Voilà qui en dit long sur l'esprit du régime, comme si les juges étaient assimilés à des monarques en puissance. On notera que dans les républiques, les suppléants du chef de l'exécutif sont habituellement des élus du peuple. Aux États-Unis, le vice-président, colistier du président, prend sa place en cas d'absence, d'incapacité ou de démission. En France, le président du Sénat prend la relève du président de la République, dans les mêmes éventualités.»

«La bonne pondération des pouvoirs de l'État est rarement un thème de débat, au Québec et dans le reste du Canada. Voilà qui est curieux, dans une fédération si souvent absorbée par la réforme de sa constitution. »

Qu'en pense M. Dutil?